
«Le dessin, c’est un outil à raconter» Christophe Chabouté
Lorsque j’étais encore à l’école secondaire je me souviens que je griffonnais constamment durant mes cours. Curieusement, aucun professeur ne m’a jamais repris à ce sujet. Je réussissais bien et c’est sans doute ce qui leur importait. Quoi qu’il en soit, ce n’est que plusieurs années plus tard que je me suis interrogée sur le pourquoi de cette habitude que j’avais prise par instinct, tout naturellement.
Je sais maintenant que le dessin intuitif est une forme d’art brut qui permet de créer un lien avec notre inconscient de manière directe. C’est donc un art profondément libre. Il consiste à dessiner ou peindre spontanément ce qui nous passe par la tête, sans faire intervenir le moindre savoir-faire et sans réfléchir à une forme concrète. C’est un art abstrait mais quand on pousse dans l’analyse de nos créations, on se rend compte que ces créations sont tout sauf abstraites.
Bien que je dessinais depuis que j’étais toute petite, à l’époque, je dessinais le plus souvent des graphismes sur des feuilles quadrillées. J’aimais regarder les formes répétitives qui donnaient comme un effet de kaléidoscope. Cependant, ce qui me plaisait le plus c’était l’effet calmant que me procurait cette activité car j’étais anxieuse. Quand je dessinais, je me sentais mieux, je faisais taire les pensées anxiogènes dans ma tête.
Ces petits griffonnages sont beaucoup plus significatifs qu’on le croit. J’ai découvert au fil du temps que chaque message visuel est composé de plusieurs éléments qui, une fois réunis dans une composition, créent en quelque sorte un message ou une expression de soi. L’expérience du dessin nous prépare aux autres genres de créations visuelles. J’ai donc poussé mon expérience en m’inscrivant à des cours d’arts pour en apprendre plus. Par nature, je m’interrogeais sur le pourquoi des choses et j’ai voulu décortiquer cet art qui résulte de mon intuition.
Les lignes
J’ai découvert ainsi, que ces lignes dont je prenais tant plaisir à créer, était un chemin fictif qui dirigeait l’œil vers différents endroits. Elles tracent, délimitent et séparent les sections d’un espace donné tout en unissant l’ensemble de l’œuvre. Elles permettent de définir des directions et une profondeur de manière plus ou moins précise selon ses caractéristiques. Selon le type de ligne tracée, elles suscitent dans l’œuvre des émotions différentes. Bref, les lignes jouent un rôle majeur dans la composition visuelle dans son ensemble. Lors d’une création intuitive et spontanée, les lignes deviennent un outil d’expression qui sert parfois à diminuer le stress ou encore augmenter la concentration.
Les formes
Je me suis ensuite attardée aux formes. Ces espaces délimités par un contour qui sont créés par une ligne fermée ou suggérée. Les formes ont souvent l’apparence d’une masse qui représente une figure abstraite ou figurative, organique ou géométrique. Elles sont souvent prétexte à l’application d’une texture, d’un motif, d’ombre et de lumière, d’une valeur, de couleurs, etc. Elles occupent généralement une place importante dans une composition visuelle, et elles sont même fréquemment le personnage ou le point central. Les formes servent souvent à idéaliser la représentation d’un message visuel précis. Leur utilisation est déterminante pour l’expression du message et la transmission de l’émotion. La spontanéité créative se traduit par des formes qui expriment souvent le discours intérieur.
La texture
La texture des choses me fascine beaucoup. Je suis sensible au sens du toucher et la texture est reliée au sens du toucher. Représentée ou réelle, la texture est l’effet d’un traitement de la surface. La texture donne des indices sur les propriétés de la matière et permet de définir les matériaux qui constituent la forme ou l’objet. Elle contribue sensiblement à l’impression ressentie devant la composition. De plus, c’est souvent la texture qui fait ressortir les effets de l’ombre et de la lumière, avec des facettes, des angles et des parties en creux ou en saillie qui reflètent la source de luminosité à de multiples endroits. Du reste, j’ai découvert, en réalisant des créations, que la texture est souvent le reflet de mon émotion.
La répétition
Quand je créais mes graphismes sur le papier quadrillé, je voyais mes dessins comme une mélodie ou un discours. Le rythme qui résultait de l’emploi répétés de certains éléments, était comme une organisation de mon espace. Ces éléments, souvent des motifs, semblables ou différents, qui s’intègrent entre eux dans l’espace en succession, en séquence, en enchaînement ou en regroupement étaient souvent des intentions d’expression et cela même je n’en était pas du tout consciente.
En fait, l’organisation dans l’espace d’un ou de plusieurs éléments selon un certain ordre engendre naturellement un rythme, donc une impression transmise par le message visuel. Cette organisation se rapproche de la musique qui peut générer un rythme enjoué, dynamique, triste, isolé, rassembleur, etc. J’ai donc découvert que l’utilisation appropriée des lignes, des formes et des répétitions renforce l’effet du message visuel.
Bref, on ne fait jamais rien pour rien, comme on dit. Les griffonnages ne sont pas anodins, ils peuvent être le prélude de créations futures. Ils peuvent aussi être des outils de gestion du stress très efficaces. Intégrer volontairement le dessin griffonné à notre quotidien, c’est s’exprimer et s’autogérer au jour le jour. Alors, n’attendez plus et offrez vous des pauses griffonnage pour laisser l’artiste en vous, s’exprimer.